Pour une intervention à destination de professionnels, on m’a demandé de répondre à la question : comment mobiliser les parents sur la question des écrans ?

Pour répondre à cette question, j’ai demandé à des parents sur X/Twitter et à des professionnels sur Facebook. A noter que les parents avec qui j’ai pu échanger font partie de ma “bulle de filtre”, ils sont donc déjà bien informés.

Point de vue des parents

Horaires inadaptés : Les parents travaillent en journée et n’ont pas de système de garde le soir.

Confiance dans les intervenants : Les parents bien informés connaissent les débats autour des écrans et savent que tous les experts ne sont pas crédibles. Ils font davantage confiance aux chercheurs reconnus, comme Séverine Erhel et Anne Cordier. Et apparemment moi aussi, même si je ne suis pas chercheur.

Terminologie de “sensibilisation” : Ce terme est perçu comme culpabilisateur, infantilisant et paternaliste.

Lien social : Certains parents participent à des actions de proximité plus par envie de socialisation que par besoin d’information.

Discours sur les écrans : Des parents estiment que parler simplement “d’écrans” est trop vague et peu utile.

Point de vue des professionnels

Manque de temps : Les professionnels notent que les parents sont souvent pressés par le temps.

Manque d’intérêt ou méconnaissance : Les parents peuvent manquer d’intérêt ou ne pas être au courant des pratiques numériques de leurs enfants.

Sentiment de culpabilité et peur du jugement : Certains parents hésitent à participer par crainte d’être jugés ou de se sentir coupables.

Faible participation malgré le besoin exprimé : Même si les parents expriment un besoin, les conférences et ateliers sont souvent peu fréquentés. Cela peut s’expliquer par une “norme de résistance aux écrans”, où chacun pense que le mésusage concerne les autres.

Recommandations

Régularité : Initialement, la participation peut être faible, mais avec le temps, l’habitude s’installe, les informations se diffusent et l’action gagne en popularité grâce au bouche-à-oreille.

Éviter la culpabilisation : Ne pas utiliser de messages ou d’affiches culpabilisantes.

Convivialité : Offrir des boissons, des gâteaux, et un moment convivial peut attirer les parents.

Garde d’enfants : Proposer un service de garde pendant les conférences ou ateliers permet une meilleure mobilisation, en particulier pour les familles monoparentales (on peut également proposer des ateliers familiaux, j’ai un format d’atelier spécifique).

Thématiques pertinentes : Organiser des sondages ou interroger les parents lors des récupérations périscolaires pour choisir des sujets qui les intéressent.

Interaction avec les intervenants : Les parents viennent souvent avec des questions spécifiques plutôt que pour l’événement en soi.

Impliquer les enfants : Les parents sont plus enclins à participer si leurs enfants sont impliqués ou si des travaux de leurs enfants sont présentés.

Approche globale : Parler du développement de l’enfant, des défis éducatifs, des émotions, du sommeil, de l’alimentation, et des apprentissages, plutôt que des écrans en tant que tels.

Diffusion en ligne : Diffuser les conférences et ateliers en ligne pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer.

The medium isn’t the message

L’aphorisme « Le média est le message » de Marshall McLuhan, philosophe des médias canadien, exprime l’idée que la nature du média utilisé pour transmettre un message a plus d’importance que le contenu du message lui-même. Dans son livre Understanding Media: The Extensions of Man (1964), McLuhan explique que les effets d’un média sur l’individu et la société sont déterminés par les changements d’échelle et les transformations que chaque nouvelle technologie introduit dans notre vie quotidienne.

Cependant, cette idée semble inadaptée à la parentalité en contexte numérique. Les parents recherchent avant tout la proximité et la convivialité, et souhaitent éviter de se sentir infantilisés, culpabilisés ou méprisés.

Malgré cela, et bien que le projet “BRD : Bouger, Rencontrer, Découvrir” porté par Bornybuzz réponde à ces critères ainsi qu’aux recommandations de la commission Écrans, il n’a pas été retenu dans le cadre du contrat ville 2024. Ce projet proposait une approche territoriale et partenariale, impliquant 15 associations et une trentaine de parents, centrée sur les besoins de l’enfant et la promotion des lieux alternatifs aux écrans. Après tout, ces lieux existent déjà. Aussi, plutôt que faire mal de la prévention sur les écrans, les collectivités territoriales auraient tout intérêt à les promouvoir. C’est ce que notre projet proposait…

Face à ce refus, je me suis interrogé sur la manière de travailler sans moyens financiers. Bien que je n’aie pas trouvé comment travailler sans salaire, j’ai réussi à proposer une solution grâce à l’intelligence artificielle. En deux heures, en incluant la scénarisation, les prompts, la génération des images, le montage et la punchline, j’ai élaboré une vidéo de sensibilisation, car c’est ce que les politiques publiques semblent exiger en raison de la norme de résistance aux écrans.

Toutefois, personnellement je trouve le résultat peu convaincant et je suis hésitant à le partager, craignant que certains puissent le trouver acceptable ou même meilleur que ce que d’autres produisent avec davantage de moyens.